La carte bancaire Cartwin
Avec la carte bancaire Cartwin lancée par le Crédit agricole, vous payez tout de suite ou plus tard. Une liberté ou un risque ? La Cartwin est la première carte bancaire – et jusqu’à présent la seule – qui offre le choix entre paiement comptant et à crédit.
On connaissait le rasoir double action : la première lame tire le poil, la seconde le coupe ; le shampoing double action, qui vous lave les cheveux tout en les démêlant ; la lessive double action, qui nettoie et assouplit pour un monde plus doux. Et voici maintenant la carte bancaire double action. Celle qui pourrait, si vous n’y prenez garde, assécher votre compte tout en enrichissant votre banque ? Vous n’y êtes pas du tout. Enfin, pas tout à fait.
Selon son inventeur, le Crédit agricole, la carte bancaire Cartwin n’a pour ambition que de faciliter la vie de ceux qui la possèdent. C’est la première carte bancaire – et jusqu’à présent la seule – qui offre le choix entre paiement comptant ou à crédit. Vous êtes en fonds ? Payez maintenant. Les fins de mois sont difficiles ? Payez plus tard.
Mais cette « liberté » a un prix. Avec une carte bancaire basique, vous réglez aujourd’hui des dépenses qui seront prélevées le 10 du mois suivant. La banque vous accorde donc de facto, et gracieusement, un crédit de quelques semaines. Avec la Cartwin, ce qui était jusqu’à présent gratuit devient payant. En optant pour le débit différé, le client puise en effet dans une réserve d’argent que lui a accordée son banquier et qui lui est facturée à un taux d’intérêt pouvant aller jusqu’à 17 %. Par exemple, pour 600 euros d’achats et un paiement étalé sur deux ans, le « libre choix » coûte une centaine d’euros supplémentaires au consommateur.
« Bon et mauvais crédit »
Du revolving ? Exactement. « Un crédit perpétuel, coûteux et dont on ne rembourse jamais le capital », résume Vanessa Dagand, de l’UFC-Que choisir. « Alors que les banques freinent sur les prêts personnels ou les crédits à la consommation, banaliser le revolving est extrêmement dangereux. Surtout quand la crise aggrave les difficultés budgétaires des ménages. »
« Revolving », le mot qui fâche. Pierre Souillé, responsable de la communication à la caisse régionale du Crédit agricole d’Aquitaine, préfère parler de « réserve permanente et adaptée ». Cette réserve n’est pas un puits sans fond, « elle est proposée selon le profil de chaque client ». Et puis dans le nom « Cartwin », il retient surtout « win », « gagnant » en anglais. « Sa vraie plus-value, c’est la souplesse, le libre choix, mais aussi la double protection qu’elle apporte au consommateur : la carte sert d’assurance contre le vol ou la détérioration pour les biens mobiliers qu’il achète avec, ainsi que d’extension de garantie. »
Les Français cultivent un curieux paradoxe. Ils sont moins endettés que leurs voisins européens, mais affichent un taux de surendettement supérieur à la moyenne. Vanessa Dagand y voit les effets de la politique des banques : « Le problème, c’est que le mauvais crédit chasse le bon. En associant crédit revolving et moyen de paiement, les choses ne peuvent qu’empirer. »
Pierre Souillé souligne que la carte bancaire Cartwin semble séduire surtout les catégories socioprofessionnelles supérieures. Celles qui, a priori, ne sont pas les plus exposées au surendettement.